Santé mentale
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Le Syndrome de Peter Pan : qu’est-ce que c’est et que représente-t-il ?

Le Syndrome de Peter Pan : qu’est-ce que c’est et que représente-t-il ?
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Enrico Reatini
La Rédaction
Psychologue spécialisé en thérapie cognitivo-comportementale
Unobravo
publié le
24.10.2024

La plupart d’entre nous, dans la vie quotidienne, consacre un peu de temps à imaginer à quel point il serait beau et agréable d’éviter une responsabilité particulière.

Pourtant, lorsque le désir d’échapper aux tâches et aux obligations devient un comportement habituel et hors de contrôle, il commence à influencer négativement la qualité de notre vie et de nos relations.

Qu’est-ce que le syndrome de Peter Pan ?

L’expression « syndrome de Peter Pan » (SPP) a été créée par le psychologue Dan Kiley dans son livre Le Syndrome de Peter Pan: Ces hommes qui refusent de grandir. Bien que cette définition s’avère intuitivement facile à comprendre pour tous ceux connaissant le personnage créé par J.M. Barrie, elle cache des pièges.

Dans le langage psychologique, le terme « syndrome » a une définition légèrement différente de celle s’utilisant couramment. En psychologie, un syndrome n’est pas un diagnostic à proprement parler, mais plutôt une collection de manifestations cliniques qui aident les professionnels de la santé mentale à identifier et à décrire une condition complexe.

Dans ce sens, il est important de spécifier que le Syndrome de Peter Pan n’est pas reconnu comme une psychopathologie ou un trouble dans aucune version du DSM. En revanche, il s’agit d’un mode de fonctionnement psychique de la personne, caractérisé par un ensemble de comportements qui indiquent la difficulté à assumer les responsabilités typiques de l’âge adulte.

Les personnes présentant ce mode de fonctionnement, bien qu’elles soient adultes sur le papier, adoptent des comportements qu’un observateur externe pourrait juger comme puérils. Ceux-ci sont associés à l’absence de maturité émotionnelle.

En plus de l’évitement de la responsabilité mentionné auparavant, on trouve fréquemment d’autres comportements tels que la procrastination et l’excès de dépendance des autres, aussi bien sur le plan du soutien émotionnel que financier.

syndrome de Peter Pan chez les hommes
Brooke Cagle - Unsplash

Le syndrome de Peter Pan : quelles sont les causes les plus courantes ?

Le syndrome de Peter Pan est lié à divers facteurs, tels que l’éducation de parents surprotecteurs, les traumatismes de l’enfance ou la peur de l’échec. Le plus petit dénominateur commun est la difficulté à grandir sur le plan émotionnel, impliquant le désir de rester dans une phase de l’enfance ou de la jeunesse pour fuir les pressions de l’âge adulte.

Dan Kiley et le syndrome de Peter Pan

Dan Kiley a décrit le syndrome de Peter Pan comme une condition où l’individu est coincé entre l’homme qu’il ne veut plus être et l’enfant qu’il ne peut plus être.

D’après Kiley, cette perception est à la base de certaines manifestations caractéristiques telles qu’une forte rigidité émotionnelle, l'excessive procrastination, les problèmes relationnels et l’établissement d’une pensée de type magique.

Il est important de rappeler que, bien que la définition de Kiley soit relativement récente, elle peut être considérée comme une étiquette renfermant des thèmes universels que la psychologie a traités depuis le début.

En fait, elle fait référence à la difficulté à faire face à un stade du développement ou, sur le plan opérationnel, elle décrit des situations cliniques caractérisées principalement par le manque d’autonomie, la peur de l’engagement, le manque de fiabilité et la difficulté à vivre les relations adultes.

Le syndrome de Peter Pan : peut-on parler de symptômes ?

Étant donné que le syndrome de Peter Pan n’est pas classable en tant que trouble mental et qu’il n’existe donc pas de diagnostic formel dans aucun manuel de classification diagnostique, il n’est pas possible de parler d’une symptomatologie spécifique. Il est toutefois possible d’identifier des attitudes ou des traits caractéristiques.

Dans un article publié en 2021 sur la revue Men and Masculinities, M. V. Batik réfléchit sur les problèmes typiques des personnes atteintes du syndrome de Peter Pan. D’après l’auteur, une des manifestations principales est précisément l’évitement des responsabilités : les personnes adoptant ce style montrent souvent des comportements irresponsables et un manque d’engagement sur le plan professionnel ou d’autres responsabilités de l’âge adulte, échappant aux tâches qui exigent de l’autonomie. 

Ils se montrent souvent indécis et incapables de prendre des décisions importantes sans l’approbation ou l’aide d’autrui.

Alors, une autre caractéristique, associée à celle précédente, est la dépendance des autres. Les individus utilisant ce mode de fonctionnement nécessitent un soutien excessif des parents, du partenaire ou des amis sur le plan émotionnel et financier.

L’immaturité émotionnelle est également un trait distinctif de cette condition. Elle se manifeste par des comportements puérils et des réactions inappropriées par rapport à l’âge chronologique. Cela se traduit normalement par une instabilité émotionnelle entraînant des réactions disproportionnées ou inadaptées dans des contextes adultes.

Ces conditions comportent aussi, bien entendu, des problèmes dans les relations affectives et amoureuses. On signale souvent une difficulté à entretenir des relations matures et stables et une forte peur des liens stables, portant à ne pas prendre en considération des engagements tels que le mariage ou la cohabitation.

Le manque de planification future et la difficulté à considérer les conséquences de ses actions à long terme en sont d’autres caractéristiques significatives.

Même les comportements narcissiques sont courants, y compris l’attitude égoïste et la faible prise en compte des besoins des autres. Il est également courant de manifester un désir constant d’être le centre de l’attention et de recevoir l'approbation des autres. Naturellement, on ne peut pas comparer le syndrome de Peter Pan au narcissisme, car ce dernier est un véritable trouble de la personnalité.

Outre ces manifestations, les personnes atteintes du syndrome de Peter Pan font face à diverses difficultés. Sur le plan professionnel, elles peuvent avoir des problèmes à conserver un emploi stable ou à progresser dans leur carrière professionnelle.

Sur le plan financier, ils ont tendance à dépendre des autres et ont du mal à gérer les finances personnelles. De plus, ils ont souvent une faible estime de soi, qui leur cause de la souffrance.

"Ces traits caractéristiques peuvent rendre la vie de ces personnes particulièrement complexe, influençant négativement plusieurs aspects de leur quotidien, à tel point que, dans certains cas, le syndrome de Peter Pan peut conduire à des périodes de faible moral et à des épisodes dépressifs.

Le syndrome de Peter Pan chez les femmes et les hommes : existe-t-il des différences ?

Kiley affirmait que le SPP était plus courant chez les hommes que les femmes. Cependant, dans l’étude de Batik mentionnée précédemment, on a observé qu’en absence d’un vrai diagnostic, il s’avère difficile d’obtenir des données sur les différences de genre par rapport au syndrome de Peter Pan.

En fait, toute observation pourrait être influencée par des facteurs culturels. D’après l’auteur, la société occidentale serait plus condescendante envers les hommes ayant tendance à éviter leurs responsabilités.

Par conséquent, les comportements adoptés par les hommes ayant ce type de fonctionnement seraient plus renforcés. En revanche, les femmes pourraient faire face aux mêmes difficultés de manière diverse à cause de la pression sociale qui les pousse vers des rôles plus adultes et responsables.

Tandis que chez les hommes, le syndrome de Peter Pan se manifeste plus facilement à travers la tendance à chercher une gratification immédiate et à fuir les situations requérant de l’engagement et de la maturité, chez les femmes atteintes du syndrome de Peter Pan, celui-ci se manifeste à travers un niveau de dépendance émotionnelle plus élevé.

Les attentes sociales pourraient également pousser les femmes à chercher l’approbation externe et à se contenter des rôles traditionnels, faisant donc apparaître le syndrome sous la forme de comportements plus acceptables socialement.

En d’autres termes, les normes de genre et les attentes culturelles influencent la manière dont le syndrome se manifeste et est perçu.

le syndrome de Peter Pan et la sexualité
Klaus Nielsen - Pexels

Le syndrome de Peter Pan dans l’amour et la sexualité

Dans un article publié sur Australian and New Zealand Journal of Psychiatry, C. Quadrio observe des schémas relationnels typiques des personnes adoptant habituellement des comportements puérils.

En particulier, l’auteur réfléchit sur les façons dont ces comportements influencent les relations amoureuses et la sexualité des hommes et des femmes.

Les réflexions menées font ressortir que les personnes manifestant plus de difficultés à assumer des responsabilités dans le domaine relationnel, ont plus de difficultés à créer des liens émotionnels profonds et durables.

En effet, il est fréquent que ces personnes recherchent des relations davantage fondées sur la satisfaction des besoins biologiques que sur un véritable lien émotionnel. Même les relations sexuelles sont souvent décrites comme étant dépourvues de chaleur et limitées à une simple quête de gratification physique.

Un aspect clé de ces relations est la recherche de partenaires attentifs, capables de gérer les conflits internes de l’individu et indulgents à l’égard de ses faiblesses émotionnelles.

De plus, d’après Quadrio, le syndrome de Peter Pan chez les hommes est caractérisé par des niveaux élevés de narcissisme et de machisme. Ces traits rendent les relations encore plus compliquées car ces individus ont tendance à être fréquemment auto-référencés et à rejeter la responsabilité de leurs actions.

Il est évidemment nécessaire de souligner que ces comportements, lorsqu’ils sont répétés et inconscients, peuvent influencer négativement tant les relations personnelles que les professionnelles de la personne, menant donc à une faible satisfaction dans la vie et à un risque plus élevé de problèmes psychologiques tels que la difficulté à gérer l’anxiété et les problèmes d’humeur.

Comment sortir du syndrome de Peter Pan ?

Lorsque les répercussions d’un style de vie trop puéril et déresponsabilisé commencent à être nuisibles pour la personne qui l’adopte ou les personnes qui lui sont chères, il peut s’avérer utile de demander l’aide d’un professionnel de la santé mentale.

Précisément, le syndrome de Peter Pan peut être abordé à l’aide de diverses approches et interventions thérapeutiques.

La thérapie cognitivo-comportementale est utile pour aider les individus à reconnaître et à modifier les pensées et les comportements dysfonctionnels, en développant des nouvelles habiletés et en favorisant une plus grande responsabilité personnelle (Alford et Beck, 1997). 

En revanche, la thérapie psychodynamique est utile pour explorer les conflits inconscients et les expériences de l’enfance, tout en aidant les individus à comprendre l’origine de leurs comportements immatures (Gabbard, 2004).

La thérapie familiale, dernièrement, implique les membres de la famille pour améliorer la communication et résoudre les conflits intergénérationnels, en affrontant les dynamiques relationnelles qui contribuent à l’entretien des comportements typiques du syndrome de Peter Pan (Minuchin et Fishman, 1981).

D’autres alternatives sont la thérapie de groupe, offrant un environnement de soutien où les individus peuvent partager des expériences et apprendre des autres, en même temps qu’ils développent des habiletés sociales et qu’ils diminuent l’isolement (Yalom et Leszcz, 2005). 

Dans les cas les plus sévères, la thérapie occupationnelle peut aussi être nécessaire afin d’améliorer la capacité à assumer des responsabilités dans divers contextes, en développant des habiletés pratiques pour la vie quotidienne (Christiansen et Baum, 2005).

Le syndrome de Peter Pan : livres et films pour le comprendre

Les livres, les films et les contes sont capables de nous offrir un aperçu plus direct des concepts qui autrement risquent de rester étroitement théoriques. Quant au syndrome de Peter Pan, il existe diverses œuvres offrant une vision profonde et variée de cette condition psychologique. 

Bien sûr, un livre fondamental pour comprendre le syndrome de Peter Pan est celui mentionné précédemment : Le Syndrome de Peter Pan: Ces hommes qui refusent de grandir de Dan Kiley. Ce texte explore en détail les caractéristiques des hommes évitant les responsabilités de l’âge adulte, en analysant les mécanismes psychologiques à la base d’un tel comportement.

Pour une compréhension plus narrative du phénomène, il est inévitable de mentionner le classic Peter Pan de J.M. Barrie. Tout en étant un conte pour enfants, ce roman offre des perspectives intéressantes sur les processus qui nous accompagnent dès l’enfance à la maturité.

L’Attrape-cœurs de J.D. Salinger est un roman qui explore le conflit entre le désir de rester jeune et l’obligation de faire face aux responsabilités de l’âge adulte. Le personnage de Holden, caractérisé par la rébellion et la difficulté à s’intégrer dans le monde adulte, offre une profonde réflexion sur les sujets de la maturité et de la croissance.

Finalement, Gatsby le Magnifique de F. Scott Fitzgerald offre une réflexion sur les rêves et les illusions de la jeunesse à travers le personnage de Jay Gatsby qui, malgré son âge, vise à recréer un passé idéalisé. Le roman explore les difficultés de grandir et l’influence du passé sur le présent.

Dans le domaine cinématographique, Hook ou la Revanche du capitaine Crochet est un film à ne pas rater. Il raconte l’histoire d’un Peter Pan adulte qui a oublié son passé et doit retourner au Pays Imaginaire pour sauver ses enfants, ce qui l’amène à explorer de manière fascinante les responsabilités et les défis de l’âge adulte.

Un autre film notable est Neverland, qui narre la vie de J.M. Barrie et l’inspiration derrière la création de Peter Pan, offrant un aperçu émouvant des dynamiques existantes entre l’enfance et la maturité.

Finalement, le film La vie secrète de Walter Mitty raconte l’histoire d’un homme vivant dans un monde de fantaisie afin d’éviter les responsabilités de sa vie réelle, qui affronte enfin ses peurs et grandit.

Nous clôturons cette petite liste en mentionnant également quelques séries TV qui montrent, à travers le prisme de l’ironie, une série de personnages qui sont l’incarnation des aspects caractéristiques du syndrome de Peter Pan.

Dans The Office, le personnage de Michael Scott interprété par Steve Carell, montre souvent des comportements puérils et une réticence à assumer les responsabilités de l’âge adulte.

Un autre exemple est How I Met Your Mother, où le personnage de Barney Stinson, interprété par Neil Patrick Harris, personnifie de nombreux aspects du syndrome de Peter Pan en refusant de s’engager dans des relations sérieuses et en menant un style de vie hédoniste.

Toutes ces œuvres, au moyen d’histoires passionnantes et de personnages complexes, offrent plusieurs perspectives sur le syndrome de Peter Pan, en explorant ses implications psychologiques et sociales.

Bibliographie

  • Alford, B. A., & Beck, A. T. (1998). The integrative power of cognitive therapy. Guilford Press.
  • Christiansen, C. H., Bass, J., & Baum, C. M. (2024). Occupational therapy: Performance, participation, and well-being. Taylor & Francis.
  • Gabbard, G. O. (2017). Long-term psychodynamic psychotherapy: A basic text. American Psychiatric Pub.
  • Heatherington, L., & Friedlander, M. L. (1990). Applying task analysis to structural family therapy. Journal of Family Psychology, 4(1), 36.
  • Kalkan, M., Batık, M. V., Kaya, L., & Turan, M. (2021). Peter Pan syndrome “men who don’t grow”:Developing a scale. Men and Masculinities, 24(2), 245-257.
  • Kiley, D. (1983). The Peter Pan Syndrome: Men Who Have Never Grown Up. Dodd, Mead & Company.
  • Minuchin, S., Fishman, H. C. (1981) Family Therapy Techniques. Harvard University Press
  • Quadrio, C. (1982). The Peter Pan and Wendy Syndrome. Australian and New Zealand Journal of Psychiatry 16 (2), 23–28.
  • Yalom, I. D., & Leszcz, M. (2005) The theory and practice of group psychotherapy. Seminal textbook on group psychotherapy.

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